Les oubliés du Sahel

Article rédigé par Tanguy Zongo

Le 14 novembre 2021 aux aurores, des terroristes affiliés à Ansar Dine, un groupe armé salafiste djihadiste, attaquent la garnison militaire d'Inata au Nord du Burkina Faso. Le bilan de cette attaque est lourd : 57 morts dont 53 militaires.

Pour beaucoup, c'est cette attaque qui sera la cause d'un coup d'État militaire

3 mois plus tard; pour certains, ce n'est qu'une attaque de plus dans une zone déjà extrêmement belligène en proie au terrorisme.

 

Loin de cette apparente réalité, l'attaque d'Inata n'est que l'incarnation du drame humanitaire dont le Sahel est victime depuis plus de 10 ans. En effet, chaque attaque djihadiste laisse dans son sillage des veuves, des orphelins, des familles endeuillées tant chez les militaires que chez les civils. Ainsi, depuis le depuis de la crise sécuritaire au Sahel on compte plusieurs dizaines de milliers de veuves et près d'un million d'orphelins. La question des veuves de guerre est au centre des préoccupations car, du fait des coutumes locales, les femmes se voient presque instantanément dépouillées de leurs biens et de l'héritage que leur laissent leurs défunts époux par leur belle-famille. Ces femmes se retrouvent dans un dilemme : accepter le lévirat, une pratique désuète (et illégale) qui consiste à être mariée de force à un frère du conjoint décédé, ou être répudiées et chassées sous couvert de pratique de la sorcellerie (le parfait motif pour éloigner de la communauté les veuves qu'on ne veut plus garder). Les orphelins pour leur part sont contraints d'arrêter l'école car dans des pays comme ceux du Sahel où l'éducation n'est pas gratuite et représente un coût financier d'ampleur pour les foyers, la mort du père rime inexorablement avec déscolarisation.

 

Au-delà de ces cas individuels, la preuve la plus parlante de ce désastre humanitaire est celui des personnes déplacées qui, pour fuir l'hydre terroriste, se retrouvent parfois à plus de 200 kilomètres de chez eux et de leurs campagnes, dans de grandes villes froides sans le sous et bien souvent sans interlocuteurs dans leur zone de repli forcé. Cet exode contraint les populations touchées à abandonner leur habitat et leurs troupeaux (quand les jihadistes ne les ont pas incendiés). Rien qu'au Burkina Faso on dénombre entre 300 000 et 600 000 déplacés. Ceux-ci sont systématiquement livrés à eux-mêmes, contraints de mendier pour survivre et vivent dans la précarité la plus complète. Ils se retrouvent pour la plupart dans les rues sans vêtements ni couvertures pour dormir, coincés dans un cercle vicieux entre le petit-banditisme et la mendicité. Les moins malchanceux vivent eux dans des camps de déplacés comme celui de Pazani, dans la banlieue nord-ouest de Ouagadougou la capitale du Burkina Faso. Ces camps n'ont de "refuge" que le nom. Face à l'afflux constant et massif de personnes déplacées venant de l'Est et du Nord du pays, les autorités du camp sont dépassées. Des groupes d'une quarantaine de personnes se retrouvent coincés dans 15m2 effaçant toute sorte d'intimité, l'accès à l'éducation n'existe plus, tout comme celui aux produits d'hygiène quotidiennes et menstruelles. Pour ce qui est de la nourriture, les quantités manquent cruellement. Un autre évènement qui a marqué les esprits est le siège de Dori, capitale bicentenaire de la région du Sahel au nord-est du Burkina Faso, par les terroristes. Depuis bientôt 2 ans les groupes terroristes assiègent la ville affamant, isolant et entraînant la mort des plus fragiles. Les différents convois humanitaires pour tenter d'approvisionner en vivre, en eau et en produit de première nécessité cette ville de 50 000 habitants et à l'héritage historique fort ont tous échoués.

Pour essayer de sortir de cette situation, il existe des associations qui organisent repas de charité, collectes de dons et de fonds et campagne de mise en lumière de ces questions. Les mères de familles tentent de créer de petits commerces, les enfants et les vieillards font la manche et les adolescents tentent de chercher du travail mais cela reste minime par rapport aux besoins.

 


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