Jean d'Ormesson : au service de la littérature

Article rédigé par Marie-Astrid Jacottet

Jean Lefèvre d’Ormesson, né en 1925 à Paris, est un écrivain-journaliste issu de la famille Lefèvre d’Ormesson (de la noblesse de robe parisienne). Son père, ancien ambassadeur, est souvent absent donc il grandit surtout auprès de sa mère, au château de Saint-Fargeau, propriété de la famille de cette dernière. Entouré de domestiques, il suit des cours par correspondance au lycée du Cours Hattemer. Il raconte notamment cette période dans son ouvrage La gloire de l’Empire en 1971. Très vite attiré par les lettres et la littérature, il obtient son baccalauréat en 1943 au lycée Masséna de Nice puis intègre une prépa hypokhâgne au lycée Henri IV puis l’ENS à 19 ans. Ayant comme professeur Louis Althusser, il passe l’agrégation de philosophie malgré l’avis défavorable de ce dernier.

En 1956, il se lance dans l’écriture et publie son premier roman, L’amour est un plaisir. Timidement vendu à 2000 exemplaires, il s’agit du début d’une longue carrière marquée par de nombreux succès, notamment La gloire de l’Empire, Au plaisir de Dieu, Je dirai malgré tout que cette vie fut belle, jusqu’à sa dernière œuvre, Un hosanna sans fin. Élu à l’Académie Française, au fauteuil 12 -celui de Jules Romains-, en 1973, ce Vagabond qui passe sous une ombrelle trouée use de romantisme, d’élocution et d’amour pour rappeler que la vie est la plus belle chose qui puisse exister. « Merci pour les roses et merci pour les épines », d’où l’importante de profiter de la vie pour se rendre compte de sa préciosité. Il défend, en 1980, la réception de Marguerite Yourcenar à l’Académie. Benjamin de celle-cà à son entrée, il meurt en étant son doyen. Son style littéraire, ciselé et poétique, emporte le lecteur dans un tourbillon d'émotions et de réflexions. À travers ses romans, Jean d'Ormesson interroge les grands mystères de l'existence, explore les méandres de la mémoire et célèbre la beauté du langage. Chaque ligne est un enchantement, chaque mot une invitation au voyage intérieur.

Il débute sa carrière dans le journalisme dès les années 1950, contribuant notamment au quotidien "Le Figaro" dont il devient le directeur général en 1974. Il en démissionne en 1977 du fait de l’ingérence exponentielle de Robert Hersant mais perpétue sa collaboration avec le quotidien. Son style distingué et son esprit brillant lui valent rapidement une reconnaissance au sein de la profession. Il gravit les échelons au sein du journal, devenant éditorialiste en chef en 1971. Son éditorial, véritable phare intellectuel, charme par sa finesse et sa pertinence, éclairant les lecteurs sur les grands enjeux de son époque. Son parcours journalistique est marqué par une constante recherche de vérité et d'élégance dans le langage. Il sait manier la plume avec virtuosité, captivant son public par ses analyses éclairantes et ses réflexions profondes sur la société. En parallèle de ses activités journalistiques, il poursuit également une carrière d'écrivain prolifique, publiant romans, essais et mémoires qui rencontrent un succès critique et public. Jean d'Ormesson incarne un journalisme d'intellectuel, où la rigueur de la pensée se conjugue à la beauté de l'écriture. Son engagement en faveur de la liberté d'expression et de la démocratie transparaît dans chacun de ses articles, où il n'hésite pas à défendre ses convictions avec passion et éloquence. Sa plume alerte et érudite fait de lui un acteur majeur de la scène médiatique française, influençant les débats d'idées et la conscience collective de son époque.

Politiquement situé à droite, il soutient en 2012 la candidature de Nicolas Sarkozy mais a longtemps évoqué le respect personnel qu’il avait pour François Mitterrand. Ayant été une des dernières personnes avec lequel le président socialiste a discuté avant de mourir, Jean d’Ormesson a ainsi pu mettre fin à des années d’hostilité qu’il entretenait vis-à-vis de lui. Il vient de la droite européenne gaulliste, de l’intelligentsia de la droite française. En 2014, il est fait grand-croix de la légion d’honneur par le Président de la République François Hollande.

Jean d’Ormesson n’est « pas fait pour le mariage » selon lui. Il épouse François Béghin en 1962, après que celle-ci lui avait annoncé qu’elle était enceinte de sa fille, Héloïse. Toutefois, les deux désirent « préserver leurs libertés respectives ».  Ainsi, incarnant à la télévision un romantisme à l'ancienne et ponctuant sa vie de liaisons passionnées et d'histoires d'amour secrètes, son charisme naturel et son esprit brillant séduisent nombre de femmes, lui conférant une aura de séducteur discret. Il finit par rencontrer Malcy Ozannat en 1974 et ne la quittera plus.

Dans la nuit du 4 au 5 décembre 2017, son cœur s’arrête, mettant fin à 92 années prolifiques, remplies d’amour et d’écriture. Sa disparition est éclipsée par celle de Johnny Hallyday, décédé à quelques heures d’intervalle, et avec lequel il partageait une lointaine parenté. Jean d’Ormesson avait déclaré, à propos d’Édith Piaf et de Jean Cocteau, qu’un écrivain ne devait pas mourir en même temps qu’une vedette de la chanson pour ne pas être oublié. Une cérémonie en la cathédrale de Saint-Louis des Invalides est célébrée le 8 décembre 2017, où Jean-Marie Rouart proclame l’éloge funèbre avant un hommage national rendu par Emmanuel Macron, en présence de la famille de l’écrivain.

De ses deux étoiles bleues de son regard malicieux et mystérieux, Jean d’Ormesson a marqué le paysage français de la littérature. Son œuvre, intemporelle et universelle, traverse les générations et continue de fasciner les lecteurs du monde entier. En maître des lettres, il laisse derrière lui un héritage littéraire précieux, témoignant de son génie créatif et de sa passion pour les mots.


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Article Rédigé par Léna Louis